« La dernière maison au bout du chemin ; c’est celle-là ! ». Je n’étais même pas sure de la trouver et pour cause ; j’avais bien pris la route indiquée au départ de chez moi : une allée à sens unique serpentant entre les toits divers, tantôt groupés, tantôt perdus au cœur d’une étendue verte et pentue, toujours plus dissimulés à ma vue au fur et à mesure de ma progression.
La piste du milieu, carrossable, descendait la forêt entre ronces et genêts, résonnant d’une eau claire coulant un peu plus bas. Je m’approchai du grand mas lumineux surplombant le vallon puis me dirigeai vers l’entrée nord, dans l’espoir d’y confirmer ma destination. Sur la grande porte de bois, une main à collerette, le heurtoir traditionnel, voisinait avec un carillon éolien au son cristallin que je choisis pour m’annoncer. Un joli siamois vint me saluer tandis que je guettais le silence durant quelques minutes. Personne !
Le chemin retournait dans l’ombre un moment avant de me projeter en pleine lumière vers la maison suivante perchée et silencieuse où je me hissais sans hâte, 600 mètres plus loin. En haut de l’escalier, d’autres pierres encore et la surprise d’un bâtiment en construction, neuf et blanc, où j’aperçois enfin une ombre humaine ! Bizarre, j’ai l’impression qu’elle se cache derrière un pilier dès qu’elle m’a vue !!! Tant pis j’insiste et frappe à la porte vitrée. L’ombre se détache et me fais signe de la rejoindre par une autre entrée pour cause de peinture fraîche. Nous échangeons peu de mots car je suis arrivée à destination, mon interlocutrice connaissant bien l'hôte à qui je rends ma première visite.
Josie a 82 ans et nous avons sympathisé « à la gym ». Elle a l’air d’une jeune fille, alerte et passionnée, parcourant son monde en 2CV en m’expliquant sa vie d’artiste et de céramiste. Veuve depuis 7 ans maintenant, elle était l’épouse d’un graveur connu avec qui elle a été mariée 60 ans. «Quand j’ai su qu’il ne savait pas danser, j’ai hésité à l’épouser» m’avoue-t-elle. Je souris à ces mots que j'aurais pu prononcer.
Et puis elle m’explique son chemin, leur chemin indissociablement lié, de Paris aux Cévennes, en passant par Madrid à la Casa de Velázquez. Une ancienne grange de 200 m2 aujourd’hui désertée, abrite les plus belles pièces de mon hôte, au goût sobre et raffiné, dont je comprends le succès auprès d’acheteurs japonais. Dans son atelier, des œuvres d’enfants, inventives ou naïves, trônent en bonne place au milieu des multiples ingrédients qui composeront l’émail, cet émail qui "est plus beau s'il cuit lentement".
Il fait nuit quand je rentre et je n’ai pas vu le temps passer. Je me sens calme, reposée et ça tombe bien parce que tout compte fait, ce maudit tiroir enfin fini en 15 h de travail ne me rapportera que... 30€ !
Mais dis donc, c’est moins que le SMIC ça (2€ de l’heure !) !!!
Commentaires
N'est-ce pas ? Il appartenait à une famille riche, d'où les grandes fenêtres, plutôt rares dans la plupart des maisons cévenoles.
Quelle merveille ce mas sur la photo ...