En te relisant, je suis retournée à nos amours d’antan. Et tout me paraissait si proche que j’en suis effrayée. Ton regard sur moi n’avait pas changé, mon envie de m’y noyer revenait soudain. Où es-tu maintenant et à quoi bon savoir ? Pour nous aimer en nous heurtant à ce qui nous a déjà séparés jadis. Mais je me rappelle…

Toi et Nougaro cherchant  « une petite fille en pleurs » et moi chantant Louise Labé avec Hélène Martin .

Je vis, je meurs ; je me brûle et me noie ;
J'ai chaud extrême en endurant froidure :
La vie m'est et trop molle et trop dure.
J'ai grands ennuis entremêlés de joie.

Tout à un coup je ris et je larmoie,
Et en plaisir maint grief tourment j'endure ;
Mon bien s'en va, et à jamais il dure ;
Tout en un coup je sèche et je verdoie.

Ainsi Amour inconstamment me mène ;
Et, quand je pense avoir plus de douleur,
Sans y penser je me trouve hors de peine.

Puis, quand je crois ma joie être certaine,
Et être au haut de mon désiré heur,
Il me remet en mon premier malheur.

Louise Labé (1524-1566)

Depuis un bon mois, je prends le temps de me constituer enfin les albums papier des photos numériques sagement classées au fur et à mesure des années ; vaste tâche qui m’occupe allègrement tant j’aime à en feuilleter le résultat. Il y a beaucoup de tri et donc la réjouissance de voir enfin à loisir une sélection de choix me ramenant aux meilleur de ma vie. J’essaie plusieurs sites pour m’amuser et profiter des offres de réduction souvent présentes en tant que premier client. En à peine 5 semaines donc j’ai franchi 8 ans en me demandant parfois comment un évènement  éloigné pouvait me paraître si proche !

Mes petits enfants grandissent de même à une allure folle. Mais j’ai la grande joie de les accueillir désormais assez régulièrement après 4 ans d’attente sans pouvoir les garder une nuit tandis que « belle maman et beau papa » les hébergeaient  sans problème dans le même temps. Quel que fut le déclic pour décider leurs parents à enfin me les confier, j’en remercie la terre entière !

Je ne suis plus une presqu’inconnue pour ces petits bouts de vie qui m’enlacent et m’appellent joyeusement lors de nos retrouvailles. J’habite en appartement  mais nous passons la plupart du temps dehors, à gambader, ramasser fruits et fleurs en été,  feuilles ou marrons plus tard, plonger un bâton dans la rivière, parcourir les calades d’entre les murs, passer par la bibliothèque, aller chercher les croissants du dimanche matin et bien sûr pratiquer les jeux publics disponibles (dont la tyrolienne qui malheureusement est réservée aux enfants !!!).

Leur enthousiasme et la vitalité parfois épuisante dont ils font preuve me permettent de perdre 1 Kg en 2 jours tout en bénéficiant d’un sommeil réparateur dès 21H… Heureusement il y a le hamac !!! Très prisé et objet de luttes parfois aussi sournoises que féroces (auquel cas, personne n’y a droit), cette balancelle de balcon a le bon goût de les attirer autant qu’il peut m’offrir de répit.

Un jour, enrhumée et patraque, j’ai filmé mes apprentis musiciens ; l'un tapant sur une boîte avec des crayons, l'autre continuant à dessiner en chantant de bon coeur : remède à la mélancolie !

C’est dans une presqu’île à l’image de nos rêves d’Océan que nous nous sommes rendues Hélène et moi. Quelques jours pour changer tout, enfourcher un vélo le long des marais, sentir le vent et le sel, regarder les oiseaux et s’évader dans la lumière gris-argent de l’estran.

Cette année, le  « papé » n’a pas mis de tomates. Les pommes de terre qu’il plantait sous les fruitiers sont aussi absentes. Je crois les apercevoir sur une parcelle plus petite,  plus loin.  Il s’en va et revient en boitant, suivi du chien noir. L’autre, le clair, un batard griffon bruyant, ne les accompagne plus. Lhomme est âgé et tenace autant qu’acariâtre.  Les moutons  ont disparu en même temps que le potager se faisait plus petit. Je pense à François qui diminue son jardin aussi depuis 2-3 ans, à 84 ans. Je ne suis pas sure de durer aussi longtemps ;  à 61 ans, débroussaillage et poids me malmènent de plus en plus, limitant mes envies en attirant ma vigilance. Depuis quelques mois, à la suite d’un méchant rhume, odorat et goût me font défaut. Le premier revient peu à peu et le second se fait attendre.  J’ai fini par consulter, inquiète. Rien aux dents, rien aux sinus, mais une cloison nasale torturée qui favorise les inflammations. Petite tension et fatigue de jour ; j’ai souscrit au test pour l’apnée du sommeil. Et après ? Une chose à la fois. Terminer la kinésithérapie pour mon pied droit, et envisager l’opération du gauche dès que possible (à mon avis l’hiver 2020). 

Moi qui me tiens d’habitude éloignée des médecins,  là je cumule ! Contrainte en outre chaque matin de me faire enlever la fibrine d’un petit carré de peau suite à une piqure d’insecte ayant mal tourné. N’empêche, je suis fière de moi : 2 kilos de moins depuis un bon mois que je me suis mise au régime volontaire « de tout un peu » en évitant quand même sucre et alcool. Ma garde-robe me sourit à nouveau tandis que je lui fais d’autres promesses.  Ce week-end, j’ai ressorti la machine à coudre pour changer mes rideaux en osant revisiter un magnifique tombé en coton brodé, de famille (j’ai attendu 3 ans avant de m’y attaquer !). Je suis ravie du résultat. Prochain défi : la moquette de la chambre ! En attendant, grillons et rainettes se disputent la quiétude du soir…