12 € ! Le coût du concert donné par un certain guitariste se revendiquant à tort musicien. Après quelques pièces ne parvenant à m’envouter car systématiquement escamotées par l’individu, je me levai pour quitter une salle plus vide que pleine – ce dont maintenant je ne m’étonnai plus. Déçue, vraiment ! Et moi qui me réjouissait d’aller enfin écouter de visu le fameux concerto de Aranjuez !!!  Trompée par l’affiche racoleuse et le prix plus élevé que l’habitude locale.

Comment ne pas penser à cet autre qui m’avait un an plus tôt régalée de sa dextérité sensible dans la petite église romane de Ste Croix, là où la tête rejoint les étoiles ; à lui, qui ne demandait rien au public, en a reçu beaucoup. Je me convaincs que grâce à ce souvenir, ce soir m’aura été moins pénible…

Un détail au moins m’aura fait sourire : le petit doigt du quidam tendu comme celui d’un « envahisseur ». Prémonitoire !!! L’homme est un bourrin ; barbe de 3 jours, col froissé et genoux usés, sa guitare pleine de traces ; une négligence devenue impardonnable en l’entendant raccourcir régulièrement là une note, ici un accord, quelque soit le morceau. Les applaudissements brefs et mous, les miens quasi muets, souffrant d’hypocrisie.

La troisième épreuve sans doute, après celles de mes deux coups de fil au SAV d’Orange pour disfonctionnement récidivant et perpétuel du service censé m’être rendu ; en 1 an, 3 changements de Windows Phone pour la même panne -écran noir pendant les appels, l’impossibilité de paramétrer 2 sur 4 de mes boîtes aux lettres sur tout autre programme que la messagerie du serveur, etc., etc…. Premier appel ; une voix de femme asiatique me fait répéter et attendre, puis répéter, puis attendre pour m’expliquer finalement que si elle peut changer mon téléphone à nouveau pour le même modèle, elle ne peut rien pour le reste. Tout ça en 20 minutes. J’appelle à nouveau. Cette fois une voix d’homme maghrébin à qui je dois répéter plusieurs fois l’objet de mon appel. Extrêmement courtois, il me fera pourtant le même cinéma (patienter, reprendre, réexpliquer) pendant 30 minutes au bout desquelles je lui dirai poliment mon exaspération de payer cette communication pour finalement constater qu’il n’en sait pas plus que moi et me raconte n’importe quoi. L’ai-je ému ? Il m’accorde sans que je le lui demande une remise commerciale de 25 € sur ma prochaine facture ! Voyons si je calcule bien, cela fait : 25 €- 10 € (total des 2 coups de fil au SAV) – 12 € (concert raté) … ? Eh bien, j’ai un avoir de 3 € sur la journée ! Elle est pas belle la vie ? !!!

Cadeau d'Annie en prime : son jus de 10 raisons "maison" : extra ! 

Ca fait trois jours et nous y voilà : en été ! Mais le saut reste âpre à franchir. Le soir vers 22H, arrive enfin la fraîcheur tant redoutée dimanche dernier. Le thermomètre fait des bonds intempestifs tandis que nous nous réfugions dans le temple pour réviser nos chants avant le concert de vendredi, ma première aventure publique comme chef de chœur en rodage sur un des morceaux choisis. Une expérience un peu chaotique à laquelle je m’accroche pourtant, supportée par une bonne trentaine d’âmes à qui n’échappe pas mes moments d’inconfort. En passant à St Jean, je m’arrête chez Henny qui m’offre petits pois et fraises de son jardin, absents du mien cette année. Je lui réserve mes premières groseilles rougissantes,  dévastées dans le sien.

Hier soir, avec Hélène, cap sur le théatre d’Alès, où nous est présenté le programme de l’année, avec une foule avide de culture. Il faut faire la queue pour récupérer son billet d’entrée (gratuit mais sur inscription préalable), puis gagner les balcons quand les parterres sont déjà pleins. On ne s’ennuiera pas un seul instant, entre la description des spectacles à venir et le divertissement apporté par un duo de chanteurs et amuseurs émérites. Le tout ponctué d’un savoureux buffet qui me laissera un arrière goût de « revenez-y ». J’y croise une bonne partie de mon groupe rando et une voisine jardinière avec qui peut-être covoiturer sur un choix commun, bonne nouvelle !

De retour ici ; le « papé » a sorti les moutons et j’y vois quelques têtes de plus, trois ou quatre biquettes tout à fait indisciplinées. Il tente de les rappeler deux fois de suite, sans succès, puis finit par s’en aller, mécontent. Le soir tombant, elles se sont regroupées près du portail où elles donnent quelques coups de tête, enfin pressées de rentrer. Juste avant la nuit, il viendra les récupérer avec une bordée d’injures et j’entends pour la première fois sa voix criarde et désordonnée. Je n’aime pas. Pourvu que les chèvres non plus…

C’est celle que je traverse dans la cage d’escalier du second palier. J’accélère le pas, indisposée.

Ma voisine du dessous a dû rentrer peu avant moi après sa promenade quotidienne. Je m’installe sur le balcon les yeux sur le ciel. Quelques aboiements au loin et au travers, un perceptible et régulier sifflement me déride ; la hulotte veille au crépuscule, me soulageant d’un coup des bruissements domestiques.

Premier bain en piscine après mon dernier cours à St Jean. L’eau est froide quand j’y pénètre quasiment seule. William et Jean Michel devisent tranquillement en surveillant un bassin vide. On s’apostrophe et je les rejoins après quelques longueurs, revigorée,  moqueuse.

J’irai ensuite faire une petite sieste reposante sur l’herbe fraîchement tondue, bercée par la rivière qui s’écoule aux abords. Le calme est complet quand je m’approche du guichet. Ils sont plongés dans une partie d’échecs en attendant la fermeture. La saison repart sereinement. Les cabines sont immaculées comme l’eau dans laquelle j’ai retrouvé une vitalité absente depuis le début de ma journée.

J’achète une bière et un dessert pour rejoindre Henny qui me submerge d’un repas somptueux que je dévore avec appétit. Je la trouve rajeunie et joyeuse ; un homme la courtise qui ne la laisse pas indifférente. Tant mieux ! Plus loin sur la route Christian m’appelle ; pour lui aussi les affaires reprennent, amour et argent. Pourvu que ce soit contagieux !!!

Paul m’avait gentiment convoqué un peu avant notre heure d’usage pour m’accompagner à la direction de « A l’ombre du chœur de ma mie », cette chanson que je proposai d’apprendre à mes « collègues » par pur désir de réentendre l’unisson des 3 voix que nous y avions trouvé, Sharon, Thierry et moi, du temps de nos réunions musicales. Bien sur, à ce travail d’oreille aveugle de toute partition, je me suis piégée moi-même. Brassens ne ressemble jamais au hasard et, entre les désaccords de la mélodie pour certains et la difficulté du rythme pour d’autres, je dus accepter de revoir ma copie et d’y travailler plus.

J’ai donc repris nos chants pas à pas pour les transcrire en notes, de la voix au clavier puis du clavier à l’écrit. Puis, entre Paul, sa guitare et ses conseils pour ne pas perdre la main, j’ai tenté de me préparer. Je ne suis pas encore très détendue, mais ça avance ; on me le dit et l’on m’y encourage. En tous cas, je garde en mémoire ce beau moment passé en musiques (rivière, rainettes, grillons, guitare, voix) dans un site d’exception.

Lui, c’est mon voisin de pré ; celui dont la terre s’étend sous l’immeuble, côté cuisine. De ma fenêtre, depuis 2 ans, je le vois agir, comme un repère ineffable, incontournable. Dès 6h, quand rarement je me lève, je le sais vaillant, se préparant la journée. A l’heure de mon petit-déjeuner, mon regard les observe, lui et sa femme, salopette et tablier, suivis de deux chiens gris et poilus, libérer les poules et surveiller les plants. Cette année est particulière. Seule la moitié de leur rectangle potager se trouve occupée et les premières pousses de salade n’ont pas tenu, gelées. Les moutons sont rarement sortis. Le pré a monté et en seulement 3 jours, il fut fauché, rassemblé, lié en bottes et… rentré ! Juste au bon moment, séché au vent avant la pluie. L’homme a bien travaillé, comme de coutume. Ce matin, il transportait les foins d'en dessus dans une vaste toile jetée sur l’épaule pour les amener au champ du dessous où ils seraient ramassés. Puis le tracteur est venu, avec les pick-up. Tout le mouvement avançait d’un bel ensemble ; lui qui, du bout de sa fourche en bois, approchait l’herbe de la machine, l’autre qui tournait son volant au ras des lignes, le troisième veillant au tout en attendant d’emporter… Giono, et la terre aux mains de ceux qui la travaillent. L’harmonie et le temps du goût. Le sens de la vie. A chaque fois une merveille…