posté le 20-03-2014 à 01:11:48

« La dernière maison…"

« La dernière maison au bout du chemin ; c’est celle-là ! ». Je n’étais même pas sure de la trouver et pour cause ; j’avais bien pris la route indiquée au départ de chez moi : une allée à sens unique serpentant entre les toits divers, tantôt groupés, tantôt perdus au cœur d’une étendue verte et pentue, toujours plus dissimulés à ma vue au fur et à mesure de ma progression.

 

Au "cap de vignes" (l’inscription de la dernière maison du haut), j’ai eu un doute : trois chemins s’offraient à mon choix sans aucune destination précise. J’ai d’abord emprunté celui de gauche, une trace terreuse à l’abri du soleil trop présent sur ma peau…pour rebrousser chemin à peine plus loin, freinée par les indices frais d’un passage de sangliers.
 

 

La piste du milieu, carrossable, descendait la forêt entre ronces et genêts, résonnant d’une eau claire coulant un peu plus bas. Je m’approchai du grand mas lumineux surplombant le vallon puis me dirigeai vers l’entrée nord, dans l’espoir d’y confirmer ma destination. Sur la grande porte de bois, une main à collerette, le heurtoir traditionnel, voisinait avec un carillon éolien au son cristallin que je choisis pour m’annoncer. Un joli siamois vint me saluer tandis que je guettais le silence durant quelques minutes. Personne !

 

Je contournai la demeure aux fenêtres grandes ouvertes côté sud, parsemée des signes d’une vie éparse et morcelée subitement abandonnée ; quelques cadres de ruche, un bain de soleil, une cabane en bois où s’encadrait la tête d’un chat noir me fixant de ses yeux jaunes. Au bord d’une petite mare, un alignement d’arrosoirs en fer blanc semblait garder non sans humour ce monde enchanté, dont je m’éloignai à regret.

 

 

 Juste derrière, un buisson de corètes du Japon jouxtait un bâtiment en mauvais état ; sans doute un logis annexe pour le personnel du nom que je découvrai maintenant sur la boîte aux lettres en comprenant subitement où je me trouvais. C’est là que mes anciens voisins, Raymond et Jeanine avaient vécu et travaillé toute leur vie avant d’être prestement «rendus à la ville», à plus 80 ans, par les nouveaux propriétaires, un jeune couple un peu sauvage.

Le chemin retournait dans l’ombre un moment avant de me projeter en pleine lumière vers la maison suivante perchée et silencieuse où je me hissais sans hâte, 600 mètres plus loin. En haut de l’escalier, d’autres pierres encore et la surprise d’un bâtiment en construction, neuf et blanc, où j’aperçois enfin une ombre humaine ! Bizarre, j’ai l’impression qu’elle se cache derrière un pilier dès qu’elle m’a vue !!! Tant pis j’insiste et frappe à la porte vitrée. L’ombre se détache et me fais signe de la rejoindre par une autre entrée pour cause de peinture fraîche. Nous échangeons peu de mots car je suis arrivée à destination, mon interlocutrice connaissant bien l'hôte à qui je rends ma première visite.

Josie a 82 ans et nous avons sympathisé « à la gym ». Elle a l’air d’une jeune fille, alerte et passionnée, parcourant son monde en 2CV en m’expliquant sa vie d’artiste et de céramiste. Veuve depuis 7 ans maintenant, elle était l’épouse d’un graveur connu avec qui elle a été mariée 60 ans. «Quand j’ai su qu’il ne savait pas danser, j’ai hésité à l’épouser» m’avoue-t-elle. Je souris à ces mots que j'aurais pu prononcer.

Et puis elle m’explique son chemin, leur chemin indissociablement lié, de Paris aux Cévennes, en passant par Madrid à la Casa de Velázquez. Une ancienne grange de 200 m2 aujourd’hui désertée, abrite les plus belles pièces de mon hôte, au goût sobre et raffiné, dont je comprends le succès auprès d’acheteurs japonais. Dans son atelier, des œuvres d’enfants, inventives ou naïves, trônent en bonne place au milieu des multiples ingrédients qui composeront l’émail, cet émail qui "est plus beau s'il cuit lentement".

Il fait nuit quand je rentre et je n’ai pas vu le temps passer. Je me sens calme, reposée et ça tombe bien  parce que tout compte fait, ce maudit tiroir enfin fini en 15 h de travail ne me rapportera que... 30€ !

 

Mais dis donc, c’est moins que le SMIC ça (2€ de l’heure !) !!!

 


Commentaires

 

1. HélèneM  le 21-03-2014 à 23:40:28

Quelle merveille ce mas sur la photo ...

2. lataraillettealn  le 23-03-2014 à 20:13:49  (site)

N'est-ce pas ? Il appartenait à une famille riche, d'où les grandes fenêtres, plutôt rares dans la plupart des maisons cévenoles.

 
 
 
posté le 16-03-2014 à 20:42:08

A bicyclette

Découverte de cette après-midi : la voie verte reliant Sommières à Calvisson, avec l’ami Robert. Après quelques déraillements intempestifs de ma monture, un claquement s’est fait entendre : la petite roue avait perdu une dent et manifestait son hoquet. Ca ne m’a pas empêchée de rouler en piquant quelques pointes de vitesse dès que le vent de face m’offrait une accalmie. OUAAAAH… , comme c’était bien !!! Toutes ces bonnes sensations (celle de sentir mon ventre se serrer pour résister un peu mieux à l’effort, celle de mon visage fendant le vent à toute allure, celle du soleil chauffant doucement ma peau et enfin celle de la détente autour d’un « panaché ») m’ont béni l’esprit. En rentrant, j’arrivais à peine à atteindre la vitesse autorisée sur la route, moi qui me sent si souvent limitée !

 

Hier c’était repiquage et tuyauterie pour le jardin. Lui en tenue de mécano, moi en oripeaux divers. On a dégusté les truites de François, pêchées de 2 jours avec un Jurançon ramené de ma dernière virée pyrénéenne. La belle vie quoi !

 

 


 
 
posté le 15-03-2014 à 00:51:15

62 ans

C’est l’anniversaire de Christine ce 11 mars et nous le fêtons ce soir chez moi, à son retour de Mâcon, d’où, après le règlement de la succession familiale, elle revient enrichie, déjà investie dans de futurs projets immobiliers. Comme Sylvie, la voici nantie brutalement après une disette économique chronique, entre le métier de mère célibataire et celui qu’officiellement la société voulut bien lui accorder (pour l’une, celle d’aide-ménagère (suffisamment ingrat pour se solder par une ablation des «organes descendus») pour l’autre celui qu’elle se créa par conviction (astrologue) complété par de multiples «petits contrats» plus ou moins reconnus.

Je pense à Rebecca et Juliette, autre mères seules, qui se débattent avec le RSA pour élever fils et fille. Je regarde Hennie, ex maman de 4 enfants, ayant quitté son mari et le confort qui l’accompagnait, pour vivoter en studio avec une minuscule retraite. Je me dis que j’ai eu de la chance, mais que ce n’est pas juste. Parce qu’aujourd’hui encore, le seul salaire qui m’est proposé reste le SMIC. Et que s’il est facile pour un homme doué de monter en grade professionnellement, ça l’est beaucoup moins pour une femme tout aussi méritante. Et que ça dure depuis trop longtemps. En silence. 

Jamais tranquille quoi ! 

 


Commentaires

 

1. oozmama  le 29-08-2015 à 13:59:10  (site)

Hé hé moi aussi j'ai eu soixante-deux anes à la fin de ce mois de Juillet 2015 !
Donc Christine est de quelques mois mon aînée.

 
 
 
posté le 09-03-2014 à 20:54:31

Pas de pot !

7h : le réveil de ma balance (j’ai oublié mon portable dans la voiture) émet un bruit strident qu’il répète à l’envie. J’ai du mal à émerger pour cause de lecture tardive ma veille au soir ; en ce moment «Une veuve de papier» de John Irving, un sacré pavé bien que, comme toujours de la part de cet auteur, prenant.

Le jour m’a devancé, déjà présent au dehors sur un ciel sans nuages. Le rendez-vous est à 9H, sur la place et j’ai besoin de tout ce temps pour m’y préparer (horreur de courir le matin !). Dans la voiture, le tableau de bord affiche 2 °, à 8H50 !  Nous serons une quinzaine à partir pour la plaine où nous attend la « guide ». 40 minutes plus loin, l’atmosphère se réchauffe. Près de Salinelles, où nous laisserons les voitures, des moteurs ronflent et s’emballent en continu. Heureusement nos premiers pas nous en écartent rapidement. Nous passons le Vidourle, majestueux et paisible avant de nous enfoncer dans la garrigue entre chênes et lauriers. Des bâtisses impressionnantes, d’un temps jadis prospère, parsèment nos traversées.

Le déjeuner tarde à arriver et l’on passera trop vite quelques endroits propices à nous y accueillir dans la sérénité, malgré les grondements de plus en plus perceptibles au fur et à mesure de notre avancée. A force de pressions des uns et des autres, notre « guide » s’arrêtera finalement sur une aire d’herbe piquante, la dernière à couvert du parcours. Là bas, heureusement, se profile une accalmie acoustique.

Mais il faut repartir et cette fois, nous approcher tout près du circuit assourdissant. Très vite nous arrivons près de l’aire de maintenance où sont parqués camions, tentes et caravanes aux dimensions démesurées. Le grillage qui nous en sépare fait 3 mètres de haut. Et, si nous le longeons avec difficulté sur une cinquantaine de mètres, force nous est de rebrousser chemin faute de passage ultérieur… celui-ci se trouvant tout simplement emprisonné dans le fameux parking où nous ne pouvons rentrer !

Le temps des parlementations pour décider d’un autre itinéraire, je prends quelques photos explicites.

 Décharge de pneus à ciel ouvert

C'était beau ...avant ! 

Un peu plus loin – nous tournons autour de ce bruit monstrueux depuis presque une heure et mon exaspération commence à poindre – notre « guide » rejettera un parcours plus serein (et à peine plus long)  le long du fleuve,  en persistant dans son itinéraire tronqué tout autour du circuit dédié. Quand j’apprends en outre qu’elle était déjà informée de cette manifestation – dont nous ne savions rien- avant de nous y entraîner, mon exaspération est à son comble. Malheureusement, si nous sommes 3 ou 4 à vouloir avancer, il nous faudra attendre plus de 20 minutes le reste de la file scotché par le spectacle devant lequel nous n’avons d’autre choix que de défiler. J’ai protesté vigoureusement pour me heurter à une vague inertie, à peine gênée. « Je suis venue pour randonner en pleine nature, pas pour voir ni entendre ÇA1» ai-je ajouté à l’intention de l’organisatrice. « Peut-être mais ces messieurs voulaient s’arrêter ».

Et la journée de la femme alors ? Ah c’est vrai, c’était HIER…



 (et c’était pas une brouette !)

 


 
 
posté le 08-03-2014 à 10:09:07

Ca pique !

Malgré les 30 ° affichés hier après midi sur le thermomètre auto, le ciel net et étoilé annonçait un matin frais. Facile à vérifier en ouvrant les volets que j’ai pris cette année l’habitude de fermer, moi qui aime tant voir le jour, pour limiter froid et factures… Côté cuisine, au nord, la blancheur du pré confirme la sensation humide ressentie au réveil, radiateur éteint. Côté sud, mes semis d’un mois résistent vaillamment sous la petite serre plastique que j’ouvre dès les premiers rayons. Les tomates font leur quatrième feuille avant leur prochain « repiquage ».

Cette semaine m’a vu beaucoup au jardin : fraises, oignons, échalottes et pommes de terre y sont désormais en terre après un désherbage laborieux dans une terre alourdie par la pluie. Dernièrement, glaïeuls et dalhias s’y sont ajoutés après avoir séjourné tout l’hiver à l’abri.

Une fois sur place, il se passe rarement une journée sans que l’on m’y rende visite, de l’intérieur ou de l’extérieur ; doucette, navets, boutures concrétisent parfois cet échange fructueux plus lié au plaisir du cœur qu’aux désaccords de principe. Comme la musique, le jardin peut ainsi rassembler toutes sortes de gens qui se retrouvent sur une même communion de langage ; ce qui m’émerveille toujours.

Lorsque Mme J. est passée devant la clôture, je ne l’avais pas encore reconnue. Elle m’a fait un grand signe puis s’est approchée. Depuis quelques mois Mme J. s’organise pour quitter son compagnon violent et alcoolique. Elle m’a tutoyée d’emblée, ce qui, ajouté à sa bonne mine, m’a confortée dans l’idée qu’elle était sur la bonne voie. J’ai appris qu’elle tenait un journal et fréquentait les cours de dessin pour « s’esprimer » (j’ai souri intérieurement en repensant à un sketch raconté par Christophe d’une « ancienne » venue le féliciter pour son concert d'une musique « un peu comme le jass »). Mme J., à 70 ans, envisage le bonheur à Sète, où vit une de ses sœurs. J’y crois autant qu’elle.

Puis Monique et Gérard sont arrivés …et je suis partie en retard pour le vernissage de l’exposition où m’attendait Robert et ses jolies photos. Après 50 minutes de route, je l’ai appelé une première fois pour précisions de ma destination. Fatiguée, mal au dos, j’ai repris le volant pour m’arrêter 10 minutes plus loin. « Je suis devant la médiathèque » « Dans quelle direction ? » « Le cimetière : d’ailleurs, je pense m’y arrêter, m’allonger sur une tombe et attendre… » « Tu es presque arrivée ! Fais demi-tour, passes devant la Mairie et l’Eglise et suis l’allée des prunus » « OK, j’essaye, mais si tu ne vois pas arriver d’ici 5 minutes, j’aurais peut-être fait une tentative de suicide ».

Au rond-point précédant la rue des arbres, 2 pancartes écrites au feutre et à peine visibles de nuit, m’indiquent le « Salon des Arts ». 150 m plus loin, un grand parking déjà plein mène au stade où se dresse le bâtiment désigné, d’où émane un bruit de basses régulier, comme s’il s’agissait d’une foire commerciale. J’ai un peu peur de ce que je vais trouver. Et mon pressentiment se confirme dès mon entrée dans les lieux où se côtoient une petite centaine d’exposants majoritairement peintres, revendiquant le nom « d’artistes » (des "would be" comme dirait Hennie). Après une succession de «croutes» plus ou moins nauséeuses, j’atteins le stand de mon ami, apparemment nullement gêné par cette juxtaposition que je juge malencontreuse. Le buffet, tardivement venu après deux discours au micro tonitruant (le Maire, qui a une belle voix de basse profonde, aurait pu s’en passer), est à l’égal du reste : chips, pastis, coca et arachides… Je m’en évade rapidement pour ne pas devenir sourde (ça résonne terriblement dans ce hangar !) et me promène à l’envie pour découvrir quelques bonnes surprises entre photo, aquarelle et mosaïque. Une affiche m’interpelle : "Les maisons moulées de 1914". Je déchiffre leur histoire écrite, que je commente tout bas. Une dame s’approche, intriguée par mon murmure. Nous échangeons sur la construction originale de l’époque (une commande de Péchiney en béton coulé pour ses ouvriers) pour finalement nous découvrir un point commun ; celui du village où j’habite et où ses parents ont tenu un café qui faisait aussi cinéma jusqu’en 1958. J’avais un an. Elle me donne des noms à retrouver, de gens et de lieux. Une enquête à mener, chouette !

 

 

 

 


Commentaires

 

1. oozmama  le 29-08-2015 à 14:11:06  (site)

Bonjour chère Luside !

"... moi qui aime tant voir le jour, pour limiter froid et factures…"

Luside j'aurais mis "... moi qui aime tant voir poindre le jour ..."

Pardon d'intervenir, tout cela ne me regarde pas !

édité le 29-08-2015 à 14:13:55

2. oozmama  le 29-08-2015 à 14:36:11  (site)

Décidément ça pique !

http://www.projet-voltaire.fr/blog/regle-orthographe/a-lenvi-ou-a-lenvie

à bientôt, dites moi si vous me trouvez relou avec mes commentaires !

3. luside  le 08-09-2015 à 19:24:28  (site)

Non non, j'aime voir le jour... même la nuit ! Et il m'arrive aussi de faire des fôtes !!!

 
 
 
 

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